Cures thermales : des « bienfaits douteux » ? Un médecin nous répond

Par Violaine Badie
Publié le 2 novembre 2022 à 17h34 dans

massage sous eau thermale

Relayée par plusieurs médias, une récente dépêche de l’AFP évoquait des « bienfaits douteux » et des « biais » dans les études menées pour évaluer l’efficacité des cures thermales. Parmi les exemples mentionnés, une étude surnommée « Thermarthrose ». Nous avons interrogé l’un de ses auteurs, le Dr Alain Françon, afin de comprendre comment sont réalisées ces recherches.

« Une étude scientifique cherche toujours à répondre à une question précise », explique le rhumatologue Alain Françon. « Dans le cas de l’étude « Thermarthrose », la question était la suivante : est-ce qu’une cure thermale améliore les symptômes de l’arthrose du genou, douleurs et limitation de la fonction articulaire, en comparaison avec l’absence de cure ? » En d’autres termes, il s’agissait d’évaluer le Service Médical Rendu ou l’efficacité de la cure thermale dans le traitement de l’arthrose, ici celle du genou ou gonarthrose.

Deux groupes de patients ont été constitués : l’un bénéficiant de l’ensemble des soins proposés lors d’une cure thermale conventionnée contre l’arthrose du genou, l’autre ne bénéficiant pas des soins thermaux mais à qui il est demandé de pratiquer des exercices physiques. « Dans le groupe ayant reçu le traitement thermal, nous avons observé une amélioration des douleurs ou de la fonction chez plus 50 % des patients6 mois après la fin de la cure. Un chiffre qui s’élève à moins de 30 % pour le groupe témoin, celui qui n’a pas reçu le traitement thermal et a seulement pratiqué des exercices physiques », détaille le Dr Françon.

Des résultats « significatifs » selon lui : « Cet essai a été mené conjointement dans 3 établissements thermaux, sur plus de 400 patients au total, donc ces statistiques ont vraiment du poids. » L’efficacité des cures thermales est d’ailleurs un sujet bien plus étudié par la communauté scientifique qu’on ne le pense : « Si en France, une dizaine d’études axées sur la rhumatologie ont déjà été réalisées, à l’international, on dénombre plus d’une centaine de publications », poursuit Dr Françon.

homme qui a des douleurs au genou

Plusieurs biais évités

La dépêche d’AFP publiée ces derniers jours accuse l’étude Thermarthrose d’être biaisée. Parmi les biais cités :  le groupe témoin n’aurait pas été suivi pour savoir si les exercices physiques étaient bien réalisés. Un biais qui n’en est en réalité pas un, comme le démontre Alain Françon : « Nous avons demandé aux deux groupes de pratiquer ces exercices, pas seulement au groupe témoin. Si des personnes ne les ont pas suivis, ce qui est probablement le cas dans les deux groupes, la situation s’équilibre totalement. »

L’expert en rhumatologie et en médecine thermale évoque un autre point sur lequel les auteurs ont veillé : « Les patients traités par les soins thermaux habitaient à proximité du lieu de cure. Ainsi, nous avons évité l’effet « vacances », quand on part loin de chez soi, qui peut apporter du bien-être en lui-même et aurait pu fausser les résultats. »

Eau, massages, boues… Qu’est-ce qui est vraiment efficace ?

C’est un autre chef d’accusation brandi par les détracteurs de l’étude « Thermarthrose ». Effectivement, l’étude évalue les effets du traitement thermal dans son ensemble, sans en détailler les soins. Pourquoi ? « Car c’est ce que demande l’Assurance maladie », répond tout simplement Dr Alain Françon. « Il faut démonter que c’est la cure dans sa globalité qui est efficace et c’est ce que nous avons cherché à faire ici. Pour entrer plus dans le détail, cela demande de réaliser d’autres études spécifiques. »

Un gage d’indépendance

L’étude mentionnée par l’AFP a été publiée en 2010 dans la revue Annals of Rheumatic Diseases. Avant d’en arriver au stade de la publication, chaque essai doit obligatoirement passer par plusieurs étapes. « Le protocole est d’abord soumis à un comité scientifique d’experts indépendants, qui jugent s’il est valide ou non. Puis, dans le cas de notre étude sur l’arthrose du genou, ce sont des experts d’une unité mixte de l’Inserm à Grenoble qui ont été chargés de récolter et de traiter les données », détaille le médecin rhumatologue.

Après l’étape de la rédaction, les études sont proposées à des revues spécialisées, où elles sont passées au crible là encore. « Nous nous sommes adressés à l’une des plus prestigieuses revues internationales en rhumatologie. C’était assez osé car les anglo-saxons ne sont pas très axés sur le thermalisme donc ils sont assez critiques et difficiles à convaincre. » Si l’étude Thermarthrose a réussi à passer ce dernier filtre et à être publiée, « cela garantit son sérieux et représente un gage d’indépendance indéniable », conclut son co-auteur.

© Adobe Stock


Sources :

2 commentaires

  • BOUDER dit:

    les effets bénéfiques des cures thermales sont certains – mais actuellement tous les Etablissements Thermaux n’ont qu’un seul objectif : LA RENTABILITE. Il y a quelques années les bains en eaux thermales duraient 20 mn (les Médecins de l’époque disaient même que c’était minimum – Des 18 mn, en quelques années les bains sont passés à 12 Minutes… C’est sur ce sujet que la S.S. et les études de bienfait devraient se pencher sérieusement. De plus il y a quelques années aussi, les boues provenaient de la Station thermale. Maintenant elles proviennent toutes ou presque toutes d’ailleurs : Sardaigne, Grèce ou autre) !!!!

    Répondre moderated
  • BORDES dit:

    Je peux dire qu’après une grave chute, trois cures, je remarche doucement, pas tous les jours mais lorsque je me sens bien ce que je ne faisais plus depuis plusieurs mois. Je pense qu’au fil des mois, mon état va s’améliorer.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

1 + neuf =

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.