Médecine thermale et prévention selon un professeur, membre de l’Académie nationale de médecine

Par L'Officiel du Thermalisme
Publié le 24 novembre 2023 à 10h25 dans

Consultation entre un docteur et son patient

La médecine thermale est une approche de soins thérapeutiques qui exploite les bienfaits des sources thermales pour traiter diverses affections. Pour évoquer le rôle de la médecine thermale et la prévention, L’Officiel du thermalisme donne la parole au Pr Christian-François Roques-Latrille, membre de l’Académie nationale de médecine.

Par le Pr Christian-François Roques-Latrille

L’irruption des maladies chroniques amène à reconsidérer le modèle sanitaire. D’un modèle prescriptif, centré sur la maladie et bien adapté aux situations aiguës, on est en train de passer à un modèle participatif orienté sur le patient et son environnement, mieux adapté aux maladies chroniques (14 millions de personnes bénéficient du régime des affections de longue durée). Le principe des 5 P régit cette nouvelle médecine : personnalisée, participative, prédictive, préventive et prouvée. C’est de la participation de la médecine thermale à la prévention qu’il sera question ici.

Les divers types de prévention 

L’OMS propose une classification de la prévention en quatre catégories. Cette classification est orientée sur la personne et sur la maladie.

  • Prévention primaire : actions pour empêcher l’apparition des maladies : vaccinations, lutte contre le tabagisme, l’alcoolisme, le surpoids…
  • Prévention secondaire : limiter l’impact d’une maladie (prévalence et sévérité) en la diagnostiquant le plus tôt possible, idéalement avant les premiers symptômes (dépistage), et/ou en limitant ses conséquences le plus possible par la prise en charge la plus adéquate.
  • Prévention tertiaire : éviter aggravation et complications, limitation d’activité, handicap d’une maladie constituée.
  • Prévention quaternaire : éviction des soins inutiles, en fin de vie, mais aussi à tout moment.

Une autre classification de la prévention a été proposée par RS. Gordon ; elle est orientée sur les populations et distingue :

  • La prévention universelle s’adresse à tous : pas de tabac, alimentation saine, ceinture de sécurité, vaccination antitétanique…
  • La prévention sélective, ou ciblée, identifie des populations à risques : pas d’alcool pendant la grossesse, port de lunettes de protection chez les travailleurs ; vaccination antirabique des vétérinaires, contre l’hépatite B des professionnels de santé, contre la grippe chez les personnes âgées…
  • La prévention indiquée est recommandée chez une personne à haut risque justifiant la mise en œuvre d’une intervention : coloscopie régulière si polypes du colon, contrôle de l’hypertension, vaccination anti pneumococcique si bronchopneumopathie chronique sévère…

La prévention doit s’intégrer dans une véritable promotion de la santé qui, orientée sur le patient et non sur la maladie, dans une approche bio-psychosociale met en exergue le rôle que le patient doit jouer pour assurer au mieux sa santé.

Ressources et expériences en matière de prévention et de promotion de la santé

Le séjour thermal est propice à la prévention basée sur l’éducation ; les patients sont dans une démarche active de santé ; ils sont nombreux à être porteurs de pathologies similaires ; ils ont du temps ; l’environnement humain et matériel est riche et adapté… L’expérience des stations dans le domaine de la prévention est ancienne : actions d’éducation à la santé (conférences sur les grands problèmes de santé, mise à disposition de documents confectionnés par les structures de santé publiques…) ; éducation du patient avec propositions d’informations ciblées sur la maladie, d’ateliers destinés à acquérir des compétences pratiques : activité physique adaptée, diététique et alimentation, mémoire, prévention des chutes, école du dos, école du souffle, soins cutanés, arrêt du tabac. Les programmes d’ETP sont une forme très aboutie de prévention et de promotion de la santé.

Certains établissements réalisent des séjours spécifiques, parfois courts, combinant soins hydrothermaux, démarche rééducative et éducative. Il existe des programmes : gonarthrose, polyarthrite ou spondylarthrite, lombalgie chronique, fibromyalgie, troubles musculosquelettiques, maladie de Charcot-Marie-Tooth, maladie de Parkinson, sclérose en plaques, séquelles de phlébite et lymphoedème du bras, suites de cancer du sein en réadaptation post cancer… Le dépistage de la fragilité avec ses divers temps d’identification, signalement, évaluation, action (ou orientation) est mis en œuvre avec la collaboration de gérontologues. C’est une action de prévention secondaire et sélective chez les personnes de 70 ans et plus.

D’autres dépistages peuvent être effectués durant la cure : le médecin thermal peut identifier des risques ou de véritables situations morbides non identifiées. La cure peut permettre l’administration d’autoquestionnaires de risque (papier ou en ligne) : « test prévention-cancer », questionnaire de risques de cancer de la vessie, du sein, autoquestionnaire de dépistage de la broncho-pneumopathie chronique obstructive, autoquestionnaires d’addictions (alcool, tabac, stupéfiants, utilisation excessive d’internet, comportement sexuel inapproprié, de sévérité de l’insomnie, de troubles anxio-dépressifs, de risques nutritionnels…

On peut réaliser des actions concrètes : apprentissage de l’autopalpation des seins, mise à disposition de kits de recherche de sang dans les selles (cancer colorectal), examen cutané de lésions pouvant évoquer une tumeur mélanique… Des études achevées montrent l’intérêt d’interventions préventives thermales sur les suites de cancer du sein, le surpoids et le syndrome métabolique, le sevrage de benzodiazépines, la prévention du déclin cognitif, les facteurs de risque de fragilité, la mise en œuvre d’activité physique chez des personnes âgées, l’insuffisance veineuse chronique, les suites de thrombose veineuse profonde, la lombalgie chronique. Ainsi, la médecine thermale a les moyens de jouer un rôle d’acteur significatif de prévention pour les curistes, les accompagnants mais aussi les résidents du territoire de santé des stations thermales.

ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER


Source :

  • Pr Christian-François Roques-Latrille, Membre Cdt de l’Académie nationale de médecine, L’Officiel du Thermalisme, le guide de la cure thermale, édition 2018, p.36-37
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

quinze + 4 =

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.