Personnalité thermale du mois : Nicolas Barnich, professeur en microbiologie à l’université de Clermont Auvergne
Par Julie Paysant
Publié le 8 avril 2024 à 14h12 dans Santé
Nicolas Barnich, professeur en microbiologie à l’université de Clermont Auvergne
Chaque mois, une personnalité du monde médical, politique, sportif ou culturel, nous raconte son lien avec le thermalisme. En avril, c’est Nicolas Barnich, chercheur en microbiologie et co-auteur d’une étude sur les effets de l’eau thermale sur le microbiote intestinal qui nous confie son histoire. Rencontre.
Les domaines d’intervention de la cure à indication Affection digestive (AD) sont multiples : troubles fonctionnelles intestinaux, maladies inflammatoires chroniques intestinales dans leurs formes légères à modérées, colites, allergies digestives et alimentaires ou encore séquelles d’hépatites. Cette cure thermale s’adresse aussi bien aux adultes qu’aux enfants. Le Pr Nicolas Barnich, directeur de l’Unité Mixte de Recherche 1071 M2iSH, s’intéresse tout particulièrement à la compréhension du rôle du microbiote intestinal, l’ensemble des micro-organismes présent dans le système digestif, sur différentes maladies intestinales.
L’Officiel du Thermalisme : C’est quoi pour vous le thermalisme ?
C’est une vaste question ! C’est d’essayer d’obtenir des effets bénéfiques en utilisant les propriétés naturelles des eaux. Cependant, ce sont des traitements complémentaires qui ne peuvent pas être des traitements de fond des pathologies. Je travaille sur la maladie de Crohn (maladie inflammatoire chronique de l’intestin) et lors d’une poussée, il est impossible de soulager le patient en ayant recours uniquement au thermalisme. La médecine thermale constitue davantage une alternative thérapeutique pour soutenir des rémissions ou maintenir un équilibre.
Comment le thermalisme est-il entré dans votre vie ?
Plus personnellement, quand j’étais enfant, mon père a réalisé des cures thermales à Saint-Gervais-les-Bains, pendant plusieurs années, pour soulager une brûlure professionnelle. Clairement, ces séjours thermaux ont eu des effets bénéfiques sur sa cicatrice et sa plaie. Il y a des effets positifs indéniables obtenus avec ces traitements naturels. Professionnellement, j’ai travaillé avec la médecin thermale Danielle Faure-Imbert de Châtel-Guyon. Elle nous a expliqué, à mon équipe de recherche et à moi-même, vouloir réaliser une étude démontrant scientifiquement les bénéfices de l’eau thermale sur la santé du microbiote. Nous avons réalisé les travaux de recherche, financé par l’AFRETh (Association Française pour la Recherche Thermale). Globalement, les travaux ont duré 4 à 5 ans et nous avons publié nos résultats en 2021.
Quelles sont les bienfaits de l’eau thermale sur le système digestif ?
Les bénéfices d’une cure thermale à indication Affection digestive (AD) sont nombreux : diminution des douleurs, régulation du transit intestinal, amélioration du sommeil et de la circulation sanguine et gestion du stress. Notre étude portait tout particulièrement sur les effets des eaux thermales de Châtel-Guyon et de Vichy sur l’inflammation intestinale et le microbiote intestinal. Nous avons induit chez des souris des colites (inflammation du côlon) modérée ou aigue puis nous leur avons fait boire de l’eau thermale pendant trois semaines (durée d’une cure thermale). Les résultats obtenus démontrent que les eaux thermales ont un impact sur la physiologie intestinale., Lors de colite modérée, nous avons observé un effet anti-inflammatoire de l’eau thermale, surtout celle de Châtel- Guyon. Globalement, nous concluons que le traitement thermal est plus adapté pour prolonger les périodes de rémission chez des patients atteints de pathologies digestives, plutôt que pour traiter des phases aigües de leur maladie. Il est nécessaire de poursuivre les recherches sur ce sujet du thermalisme en réalisant un protocole clinique. Il sera basé sur l’étude de l’évolution des microbiotes intestinaux des curistes entre le début et la fin d’une cure thermale.
Comment prendre soin de son microbiote intestinal ?
Ce qu’il faut avoir en tête, c’est que les microorganismes de notre tube digestif mangent ce que nous mangeons. Les bactéries ont besoin, pour produire des molécules bénéfiques, de fibres. Il est donc important de consommer des fibres et d’éviter les sucres à assimilation rapide et les graisses animales. On peut faire des entorses au règlement mais il ne faut pas oublier de bien équilibrer son alimentation. Il est nécessaire aussi d’éviter les additifs et les conservateurs, retrouvés dans les produits ultra-transformés, qui ont un impact négatif sur la santé du microbiote. Le sommeil et l’activité physique ont également toute leur importance. La dérégulation du microbiote peut être provoquée par la fatigue et l’excès de sédentarité. L’enjeu est de trouver le bon équilibre en interrompant, dès que possible, les périodes de sédentarité trop longues et en réalisant régulièrement des activités physiques plus ou moins intenses pour oxygéner son organisme.